CETA - saisine inédite du Conseil constitutionnel

Le 22 février dernier, sur la base de l’analyse publiée par l’Institut Veblen, la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) et Foodwatch, en collaboration avec d’éminents juristes, plus de 110 députés, rejoints par 43 sénateurs, saisissaient le Conseil constitutionnel pour vérifier la compatibilité du traité commercial entre le Canada et l’Union européenne (sigle CETA en anglais) avec la Constitution française. Par cette procédure inédite, le Conseil était interrogé pour la première fois sur un accord de commerce et d’investissement et avait ainsi l’occasion de mettre en place des « garde-fous » protégeant la capacité des Etats à réguler dans ce type d’accords.

En dépit des enjeux, le Conseil constitutionnel n’a pas répondu en détail aux différents points soulevés dans l’analyse juridique identifiant des incompatibilités avec la Constitution.

En outre, sur les menaces liées à la mise en place d’un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats entre l’UE et le Canada, le Conseil livre une analyse déconcertante dans laquelle il refuse de considérer que les risques de poursuites (et de devoir payer des indemnités très élevées) auxquels les Etats ou l’UE seront désormais exposés sont susceptibles de dissuader d’adopter de nouvelles réglementations de protection des citoyens et de l’environnement. Quant à la question de la rupture de l’égalité devant la loi entre les investisseurs nationaux et les investisseurs internationaux, le Conseil considère qu’elle est justifiée par le traitement qui sera réservé aux investisseurs français au Canada. En d’autres termes, le Conseil constitutionnel vient de valider le fait que les investisseurs canadiens (ou étrangers présents au Canada, dont 80 % des entreprises étasuniennes présentes dans l’UE) puissent exiger des compensations auprès d’une juridiction d’exception alors que les investisseurs nationaux devront aller devant les juridictions nationales.

La procédure enfin pose question. Le Conseil avait annoncé en mars qu’il mènerait des auditions pour mener à bien sa mission. Mais au-delà de la liste des auteurs, celle des personnes auditionnées reste un mystère. L’Institut Veblen, Foodwatch et la FNH avaient écrit au Conseil pour demander à être entendus ainsi que certains juristes avec lesquels les trois organisations avaient travaillé. Le Conseil n’a même pas jugé utile d’accuser réception de ce courrier.

Le CETA n’est pas pour autant ratifié. La FNH, l’Institut Veblen et Foodwatch réitèrent leur demande à la France de refuser l’entrée en application provisoire du CETA, tant que des doutes juridiques persistent et que les Parlementaires français n’ont pas été consultés.

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