Sivens - Rémi Fraisse : 3 ans plus tard, où en est la démocratie ?

Il y a trois ans, Rémi Fraisse, un jeune bénévole de Nature Midi-Pyrénées, mourait en défendant la zone humide du Testet contre le projet destructeur du barrage de Sivens, dans le Tarn.

Qu’un citoyen meure en défendant pacifiquement une cause est inadmissible. L’Etat doit prendre toutes les précautions pour qu’un tel drame ne se reproduise pas. Au-delà des grandes postures sur les zadistes et l’autorité de l’Etat, le Gouvernement doit mettre en œuvre des solutions pour qu’à Notre-Dame-des-Landes (près de Nantes) ou encore à Bure (Meuse), sur le site d’enfouissement des déchets nucléaires, la situation ne s’envenime pas. Cet été, des altercations graves ont eu lieu à Bure. Il est plus que temps de trouver les voies de la concertation plutôt que de tenter le passage en force. Car, au-delà du drame humain, Sivens est l’illustration de l’échec total d’un processus légal respecté en façade mais en réalité vidé de toute substance : procédures bâclées, absence d’étude des alternatives, soupçons de conflits d’intérêts, démission de l’Etat et des responsables politiques, recours juridiques jugés trop tard et donc inefficaces. Tous les ingrédients pour construire le scénario du pire, qui tourne inévitablement à la confrontation. En 2011 déjà, un rapport sur la concertation environnementale présenté au président de la République soulignait que « la défiance des citoyens n’a fait que s’amplifier ces dernières années, face notamment au nombre croissant de scandales sanitaires et environnementaux ».

Trois ans après, qu’est-ce qui a changé ? Peu de chose malheureusement.

Suite à ce drame, alors que le président François Hollande s’était engagé, face à France Nature Environnement, en faveur d’un « choc de démocratie », une commission a produit un rapport et des ordonnances ont été faites. Elles sont sur le point d’être ratifiées au Parlement. On constate pourtant un large fossé entre les discours et la réalité dans les territoires : sur le terrain, les citoyens ont de moins en moins accès à l’information environnementale, tandis qu’on ne fait que complexifier les textes en haut lieu au détriment de tout réel progrès, de stabilité juridique, et donc de démocratie.

Pire, un projet de loi de « simplification » a encore été annoncé pour la fin de l’année. Nous espérons qu’il ne sera pas, comme d’autres textes de « simplification » l’ont été dans le passé, l’occasion de régressions du point de vue environnemental (restriction de l’accès à la justice pour les associations, affaiblissement des dispositifs d’enquête publique, régression des normes…).

Le discours actuel visant à supprimer toutes les règles qui ne sont pas imposées par l’Union européenne nous semble également dangereux. C’est en effet prendre le risque, sous couvert de « libérer l’économie », d’exacerber les positions et de pousser au durcissement des conflits alors que justement l’Europe préconise la transparence dans la prise de décision pour que le public soit sensibilisé et acteur de la décision.

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