Le rendez-vous du mois

Maryvonne Bauer

Une consultation a été lancée début 2019 par la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale pour connaître le souhait des Français de conserver ou non le dispositif actuel de l’heure d’été. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette consultation ?

Cette consultation dite « citoyenne », en ligne du 4 février au 3 mars 2019, ne correspond pas aux attentes légitimes des Français (67 millions) ! La Commission ne les a pas informés sur les conséquences sanitaires, environnementales et économiques de maintenir l’heure d’été (UTC+2, soit l’heure solaire + 2 heures) toute l’année. De plus, une grande partie de la population n’a pas participé à cette consultation, n’étant pas connectée ! Par ailleurs, les questions étaient technocratiques et biaisées. Selon les chronobiologistes, les répondants ont interprété la question « Préférez-vous l’heure d’hiver ou l’heure d’été ? » comme « Préférez-vous l’hiver ou l’été ? » Tout le monde préfère l’été… Enfin, chacun pouvait participer autant de fois qu’il le voulait, encouragé dès le 17 février par des « fuites » dans les médias, avec incitation à répondre « l’heure d’été » !

Nous avons, comme l’ACHED (Association française contre l’heure d’été double), demandé l’annulation de cette consultation à la présidente de la Commission, dont nous attendons toujours la réponse… Cette pseudo-consultation a reçu 2 103 999 réponses anonymes, avec 1 256 297 réponses en faveur de « l’heure d’été », soit moins de 3 % du corps électoral qui est de 47 millions ! La phrase trompeuse des médias, « 59,17 % des Français ont choisi massivement l’heure d’été toute l’année. » représente un vrai déni de la démocratie !

Comme nous l’a écrit le vice-président du Sénat, qui nous remercie de notre action « pour faire en sorte que la France choisisse de se rapprocher de l’heure solaire » qu’il défend, « la démocratie, c’est d’abord le débat et ensuite la consultation, et pas l’inverse ! Consulter nos compatriotes sans les avoir informés au préalable des enjeux du débat ne rime à rien et ne peut absolument pas être retenu ».

Ces résultats non représentatifs ont été relayés dans les médias et n’auraient pas dû l’être, car la Commission a considéré qu’ils seraient « non contraignants » en n’engageant pas l’Europe à produire une directive allant dans le même sens !

Que reprochez-vous au dispositif actuel ?

En tant qu’ex-professeure, j’ai constaté la fatigue de mes élèves. En période « été », à 8 heures, il était en réalité 6 heures, il faisait nuit noire. L’après-midi, ils étaient peu concentrés, turbulents, voire agressifs. Lors des échanges scolaires au printemps, les jeunes Européens se plaignent toujours des levers précoces de nuit pendant leur séjour en France : il n’y a guère qu’en décembre que ces jeunes se lèvent de nuit dans leur pays !

Actuellement, en période « hiver », presque toute l’Europe est à l’heure normale de ses trois fuseaux horaires : UTC, UTC+1, UTC+2, soit 23 Etats membres. La France est le seul pays d’Europe avec l’Espagne et le Benelux à être dans cette situation.

Le coût des problèmes de santé générés par cette mesure contre-nature est estimé à au moins 131 milliards d’euros par an ! Les chronobiologistes européens confirment que le maintien, toute l’année, de l’heure normale du fuseau horaire, appelée aussi « heure standard », resynchroniserait le rythme circadien en douceur. Il s’ensuivrait une société moins violente, car physiologiquement et psychologiquement plus équilibrée, et en meilleure santé (moins de stress, de troubles du sommeil, d’obésité, de diabète, de cancers, de dépressions, de suicides, etc.).

En octobre 2018, la communauté des chronobiologistes et autres spécialistes du sommeil ont interpellé le président de la République, le Premier ministre, les ministères chargés de la Santé et des Transports en leur apportant des données scientifiques. Ils n’ont reçu aucune réponse gouvernementale !

De plus, sur le plan environnemental, le rapport entre l’avancement de l’heure (qui oblige à utiliser sa voiture par exemple aux heures les plus chaudes – pour rappel, l’été à 18 heures, il est en réalité 16 heures) et l’impact sur le climat (le dispositif cause alors un accroissement de la pollution de l’air à l’ozone) est scientifiquement prouvé (exemple : les canicules et les épisodes cévenols et méditerranéens plus fréquents) !

C’est pourquoi La Méridienne demande le retour à l’heure UTC toute l’année ou, en compromis, l’heure la plus proche. Elle fait d’ailleurs partie d’un réseau européen de 40 associations qui sont sur le même positionnement.

Quels conseils pratiques donneriez-vous aux lecteurs qui veulent éviter trop de désagréments avec les changements d’heure cette année ?

Favoriser une chrononutrition, s’oxygéner, faire un footing le matin (pas le soir), faire une courte sieste après le repas de midi, manger sainement et préférer une alimentation bio à base de légumes et peu de viande. Se manifester auprès des élus, des syndicats et des établissements scolaires pour changer les horaires, d’autant plus lors des canicules… S’informer et signer la pétition contre l’application de l’heure UTC+2.

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Jean-Pierre Camo

Directeur de la publication et romancier

La saga du vinland
De Jean-Pierre Camo, éd. Alphée, 472 p., 2008.

infos : www.biocontact.fr