BILLET

2024, ANNÉE DE L’ADAPTATION ?

Lisa Pujol

JUILLET-AOûT 2024

358

« Mesdames, Messieurs bonsoir ! La canicule ne faiblit pas, des températures extrêmement chaudes sont encore attendues demain, avec des records à Nîmes, Nice et Toulouse, où l’on attend 43 °C et un soleil ardent dès le matin. / À partir de demain, aucun chantier ou travaux d’extérieur ne sera autorisé et il est recommandé de limiter ses déplacements. / Le gouvernement va prochainement présenter son plan d’action antidébordement, les systèmes d’évacuation actuels n’étant plus adaptés aux prévisions des fortes pluies automnales. / En Corse, l’épidémie de dengue ne faiblit pas, 500 nouveaux cas ont été recensés. / Des experts ont mis au point un vin de Bordeaux millésime 2000, le résultat est saisissant, on en oublierait le goût sec et amer du vin actuel ! / Mauvaise nouvelle à l’instant, on apprend que la forêt des Landes a entièrement brûlé… » Fictionnel, ce bulletin info n’en est pas moins basé sur de réelles inquiétudes scientifiques. Maintenir l’élévation de la température en dessous des 2 °C comme le prévoit l’Accord de Paris sur le climat semble aujourd’hui difficilement atteignable. Début 2023, le ministre de la Transition écologique avait annoncé pour 2024 un plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC 3) pour préparer la France à un scénario à + 4 °C (!) d’ici à 2100. Faisant de 2024 « l’année de l’adaptation », le « point de départ pour construire ensemble une nation plus résiliente et plus forte dans un monde qui se réchauffe ». Il n’est à ce jour pas publié. Malgré les pluies copieuses de ces derniers mois, c’est un autre scénario qui se prépare pour cet été où le risque de sécheresse n’est pas écarté. Comprendre, agir, s’adapter… trois enjeux cruciaux de plus en plus préoccupants à la une du dossier ce mois-ci. Comprendre le cycle de l’eau et comment le changement climatique intensifie les périodes de sécheresse et impacte les ressources hydriques. Agir en déployant ou en poursuivant des actions diversifiées au niveau national et local. S’adapter… pour assurer un avenir durable, débarrassé de visions court-termistes et de fausses bonnes idées. Car les grandes réponses actuelles du gouvernement en matière d’adaptation à la crise de l’eau augmentent la vulnérabilité des écosystèmes plutôt que de les protéger : mégabassines pour « répondre » à la raréfaction de l’eau, canons à neige pour « maintenir » l’industrie du ski, constructions de digues en béton… témoignent plutôt d’une « mal »-adaptation, à grand renfort d’argent public, de privatisation de l’eau, de bras de fer antidémocratiques et de crises sociales. Il en est, aujourd’hui, des lieux emblématiques de ces « batailles » de l’eau : Sivens, Caussade, Vittel… Mais s’il y a bien un endroit où s’est cristallisée la lutte pour une véritable adaptation autour des usages de l’eau, c’est à Sainte-Soline. Les mobilisations retentissantes menées par les Soulèvements de la Terre et Bassines Non Merci ont fait trembler le vieux monde, un système bouffi de ses privilèges qui refuse de se questionner, et ont montré l’urgence d’une réponse hautement démocratique pour protéger notre bien commun le plus précieux.