Le rendez-vous du mois

Camille Rey-Gorrez

Comment est née l’association ? Quels sont ses objectifs ?

Mountain Riders est née d’un constat douloureux : au printemps, la montagne est jonchée de déchets ! Or, en été, la montagne est le berceau des alpages mais aussi là où débute le cycle de l’eau. Alors, en 2001, la joyeuse bande de moutons libres que nous sommes, passionnés et engagés, s’est « domestiquée » sous forme d’association pour l’éducation au développement durable pour une montagne propre ! Des Pyrénées au Jura, du Massif central aux Alpes, notre objectif est de sensibiliser sans moraliser. Pour nous, la montagne est aussi essentielle que fragile. Prendre au sérieux les différentes crises – climatiques, sociales et économiques – est prioritaire, y répondre est aussi possible ! C’est notamment en encourageant les enfants et les jeunes à devenir des moteurs du changement, en invitant les pratiquants à s’engager dans une démarche responsable, en accompagnant les acteurs du tourisme, ou encore en impliquant les citoyens et les élus, que nous agissons. Notre force, c’est de toujours être en mouvement, d’oser et d’innover ! Dans nos actions de sensibilisation, d’éducation et d’accompagnement, comme nos campagnes de ramassage des déchets en montagne, nous nous appliquons chaque jour à incarner le changement que nous souhaitons voir dans le monde.

A ce propos, ne craignez-vous pas que ces campagnes de ramassage incitent finalement le public à continuer de produire toujours autant de déchets ?

Ces opérations sont avant tout symboliques et visent la réduction des déchets à la source. Notre objectif est de ne plus avoir à organiser ces opérations ! Un ramassage est efficace uniquement s’il permet de renforcer l’engagement des bénévoles y participant, mais aussi d’éveiller les consciences des décideurs pour qu’ils mettent en place des solutions (poubelles de tri sur les lieux d’affluence, panneaux de sensibilisation, distribution de cendriers de poche, etc.) afin d’enrayer la problématique et de réduire les déchets sauvages à la source.

La saison des sports d’hiver bat son plein. En quoi les sports de montagne sont-ils délétères pour l’environnement, et notamment l’hiver ?

La saison des sports d’hiver a un impact direct sur la montagne, sur la faune, la flore et la ressource en eau qu’elle représente. L’aménagement d’une station a un impact sur cette biodiversité, bien sûr. Cependant, il existe des solutions pour concilier aménagement et préservation. Par exemple, il est important d’alerter les usagers de l’existence d’espèces protégées vivant sur ces territoires qui sont souvent dérangées par la présence humaine : un animal affaibli, car dérangé durant l’hivernage, n’aura pas l’énergie nécessaire pour survivre à l’hiver. Mais l’impact sur la biodiversité est bien relatif par rapport à celui du transport : le bilan carbone d’une station est à 60 % dû aux émissions de gaz à effet de serre liées aux transports (pour rejoindre la station de montagne) et seulement à 2 % à l’aménagement. Autre impact des sports d’hiver : leur contribution au changement climatique, à travers nos modes de consommation – si nous achetons du matériel neuf, par exemple. La particularité de la montagne est qu’elle est notre château d’eau et notre plus grande réserve de biodiversité. C’est pour cela que l’enjeu du respect et de la conciliation est essentiel.

Lors du salon Expérience Montagne organisé à Paris en novembre dernier, vous avez décerné de nombreux Flocons verts. A quoi correspond ce label et que garantit-il ?

Le Flocon Vert est un label décerné aux stations qui y candidatent et qui respectent un cahier des charges comprenant 20 critères composés de 130 indicateurs, comme le respect de l’environnement et de ses ressources naturelles, les initiatives en faveur de l’économie et de l’agriculture locales, le respect des normes d’accessibilité des personnes handicapées, etc. Le comité de labellisation est composé de nombreux acteurs, dont Mountain Riders. Le label a pour objectif d’engager et de structurer la transition écologique des stations de montagne en impliquant les parties prenantes du territoire. Une trentaine de stations sont inscrites dans le processus de labellisation depuis 2013. Enfin, il donne au consommateur une vision claire des destinations touristiques de montagne responsables. Aujourd’hui, 10 stations sont labellisées Flocon Vert : Chamrousse, Les Rousses, Châtel, les 4 stations de la vallée de Chamonix-Mont-Blanc, la Pierre-Saint-Martin, Valberg et Megève.

Enfin, quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs qui s’apprêtent à partir à la montagne pour s’adonner aux sports d’hiver ?

Si vous le pouvez, choisissez votre destination labellisée Flocon Vert. Avant cela, optimisez vos modes de déplacement, cela vous permettra de réduire votre impact carbone : privilégiez les transports en commun pour rejoindre votre logement, mais aussi les stations. Sur place, dégustez des produits locaux : de nombreux producteurs vendent leurs produits en direct. Et informez-vous sur les zones de quiétude ou d’hivernage des espèces protégées, comme celles du tétras-lyre, pour ne pas les déranger.

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Jean-Pierre Camo

Directeur de la publication et romancier

La saga du vinland
De Jean-Pierre Camo, éd. Alphée, 472 p., 2008.

infos : www.biocontact.fr